Quelque part au large des terres inconnues, sur des eaux paisibles voguait l’Archeron, vaisseau du capitaine Thanatos et de son équipage. Cela faisait plusieurs heures qu’ils attendaient là immobiles en plein milieux de ce no man’s land aquatique, guettant le moindre signe de la flotte du Sultan Ostros. Ils étaient en retard et cela avait le don de tendre tout le monde. En effet, rester inerte en pleine mer, surtout pour des pirates pouvait signifier pas mal d’ennuis si une flottille de la marine du doux avait la bonne idée de passer dans le coin.
Thanatos quand à lui était assis à cheval sur le beaupré, adossé aux cordages du petit foc. Il était en train de rouler sa troisième cigarette avec habileté. Il ne fumait que rarement;seulement en de rares moments de stress, ou les herbes qu’il avait récupérés sur un navire commerciale quelques mois plus tôt lui permettaient d’entrer dans un état de détente intense. Les petits ronds de fumée qu’il formait avec grâce s’élevaient tranquillement dans les airs. Le capitaine, une fois de plus, était perdu dans ses pensées, observant fixement l’horizon.
C’est-ce moment que choisit son second pour interrompre ses rêveries. Son inquiétudes avait visiblement pris le dessus sur son calme et, après avoir parcouru le navire de la poupe à la proue, il avait finalement pris l’initiative de venir voir le capitaine.
Capitaine Thanatos! Excusez moi de venir vous déranger de la sorte, mais ne devrions-nous pas quitter ces lieux ou seul le malheur nous attend si notre employeur décide finalement de ne point donner suite à sa commande ?
Sans se retourner, ni même esquisser le moindre mouvement montrant qu’il avait entendu ce que l’on venait de lui dire, il entrepris de répondre, avec un ton calme et détendu.
Il viendra. Sachez mon cher Firios que cet être étrange est reconnu comme étant homme à tenir parole. Et si nous ajoutons à cette analyse son intérêt démesuré pour ces babioles que l’on nomme relique dans les milieux intéressés, nous pouvons être sur qu’il viendra dusse-t-il affronter le tempête et la marine du doux pour le faire.
Puisse calypso vous donner raison! Car si la marine le précède, cela nous vaudra une énième poursuite.
Les craindriez vous ?
Quoi ?
Les poursuites avec la marine! Ne sont-elles pas une part importante et excitante de notre emploi? Car après tout, de chasseur à chassé, nous passerons toute notre vie entre l’un et l’autre, car tel est notre destin!
Je vous l’accorde, mais je suggère néanmoins de ne point trop tenter la chance car il se pourrait qu’elle ne finisse par se dérober, causant notre perte!
Et ne serais-ce pas une fin digne de nous que de finir de la sorte?!Dans un ultime et héroïque combat contre la marine du doux?
Une fois de plus, je vous l’accorde , mais j’apprécierais que cet épique épisode intervienne le plus tard possible.
Soit! Je dois avouer que la dessus nos points de vue s'accordent! Mais nous remettrons cette discussion à plus tard car voilà notre client qui pointe le bout de son nez… ou plus tôt de son museau!
Il se leva alors avant de s’étirer et de redescendre d’un pas rapide vers le pont sous les regards attentifs des membres de l’équipage présents sur le pont. Firios quand à lui restait interdit devant la portée de vue effroyable de son capitaine qui rendait dans de nombreux cas, l’utilisation d’un vigie inutile. D’ailleurs, ce dernier prêtait à son tour de la voix.
Navire en vue a tribord!
Bien, emmenez du rhum et des cacahouètes pour accueillir notre invité!
Mais monsieur, répondit un des jeunes mousses , je ne suis pas sur qu’un félin mange des cacahouètes… ni ne boive de rhum…
Qui a dit que c’était pour lui?
Sur cette dernière blague, l’équipage se permit une partie de franche rigolade, éliminant du même coup les vestiges du stress qui les assaillait quelques minutes plus tôt.
Bon trêve de plaisanterie, préparez tout de même les canons, on ne sait jamais, des fois qu’il n’ait pas l’intention de payer leur due à des pirates qui, sans doute on pillé quelques navires chargés d’approvisionner leur royaume.
Mais capitaine, se permit tout de même Firios, vous ne disiez pas qu’il s’agissait la d’un homme d’honneur ?
Si, mais nous ne sommes jamais trop prudent.
Sur ces derniers mots, il s’approcha du bastingage ou il s’accouda en attendant son ôte. Il tira une dernière fois sur ce qui restait de sa cigarette avant de lâcher le mégot par-dessus bord d‘un geste désinvolte, fixant le navire qui s’approchait.