[Oriflamme Nébuleuse : Partie II] Plans... d'attaque

Obscurité profonde...
Brume humide glaçant les os...
Hululements d'oiseaux nocturnes...
Senteurs de sous bois, mêlée à celle de la pluie...

J'avançais sans un bruit dans la forêt qui agrémentait la vue de l'aile Ouest de la bibliothèque hangratiale. La nuit avait jeté son plus profond voile d'ombre sur les terres du Doux. Le ciel avait beau être sans nuage, la nouvelle lune ne distribuait plus sa lumière argentée. Seul, au loin, la lumière de la bibliothèque se diffusait dans le brouillard. Tant mieux. Les gardes ne verraient que moins bien nos agissement. Pas mes yeux d'elfe. Ils repérèrent d'ailleurs un mouvement, et je dégainais mes dagues, paré à toutes éventualités. Fausse alerte, le renard détala, allant chercher sa pitance plus loin. Il fallait que je me calme, après tout, ce n’était pas la première, ni la plus dure infiltration que j’allais mener. Et pourtant… Pourtant la dernière fois que je m’étais glissé discrètement en milieu ennemi remontait à bien avant la Vague Sombre… Serais-je apte ? Thanator avait-il eu raison de me prendre à ses cotés ?

"Va falloir que j’arrête de me ronger les sangs, c’est ça qui risque de tout faire foirer..."

Et c’est dans ce déchirement entre mon ego et mon pessimisme naturel que je m’approchais de lieu de rendez-vous…

La clairière choisie m’apparue enfin, au détour d’un bosquet de noisetiers. Sombre, froide, sans âme qui vive… J’étais le premier à mettre présenté au rassemblement…

"Et aller, comme d’habitude, c’est toujours moi qui met tout en place… "

En un soupir d’agacement, je fouillais ma besace à tâtons, tout en admirant le luxueux bâtiment que nous allions investir, mes compagnons, Obscurs ou non, et moi. Extirpant une fiole au contenu transparent, je l’envoyais se briser sur le sol. Au bout que quelques instants, le liquide translucide se mit à briller d’une pale clarté bleutée, indécelable par les gardes de la bibliothèque, mais amplement suffisante pour une réunion discrète. Avisant une grosse pierre, je m’installais, attendant l’arrivée des autres.

Cependant, l’humidité eu raison de mon immobilité, et je faisais à présent les cents pas, dans l’optique de me réchauffer un peu... Une rafale de vent fit frissonner les cimes. Machinalement, je jouais avec l’une de mes dagues, la faisant tournoyer dans ma paume... L’odeur de terre humide se fit plus forte. J’avalais une potion d’éveil, afin d’être frais toute la nuit durant et de ne pas ressentir les effets du sommeil demain... La lueur blafarde de la lointaine bibliothèque vacilla… C’est alors que je dégainais ma seconde dague, et me plaçais en posture de défense, tout les sens aux aguets…

Un pied venait de briser une brindille non loin de la clairière…

« Sacré putain d'humidité... », grommelais-je . Aëraël n'avait jamais été simple et aujourd'hui il nous donnait tous rendez vous au milieu de ce bois, en pleine nuit. Encore heureux, je ne dormais pas beaucoup, voire pas du tout certains soirs, mais crapahuter tel un pauvre fantassin dans la boue collante et la nuit complète n'était pas du ressort de ma classe. Et pourtant...

Cette humidité me parvenait de partout, malgré mon manteau fermé et la capuche rabattue sur ma tête. J'avançais à pas lents, sans aucun bruit qui ne puisse filtrer. Les conifères de la forêt dégageaient leurs odeurs fortes et musquées, j'effleurais leur surface rugueuse en enjambant une racine au moins trois fois centenaires.

Au fur et à mesure les arbres devenaient plus clairsemés, la vision était plus aisée, le froid moins humide et plus vif dans les poumons. Mes orbites qui voyaient mieux que ceux d'un simple humain dans la nuit scrutèrent le lointain. La lumière bleue caractéristique du Fou s'annonçait, telle un drapeau flottant dans une mer d'obscurité. J'arrivais aux abords de la clairière.

Le Fou était instable en ce moment, je ne souhaitais donc pas le surprendre, pour préserver mon existence, mais aussi pour la sienne. Dans le cas d'un réveil du Sombre, je devrais me défendre et peut être l'exécuter. Je faisais donc craquer volontairement une branche sous mon pied, afin de l'alerter de ma présence.

« Alors vieux briscard, c'est tout? Une seule ridicule lumière bleue? Pas d'artifices grandioses? », le taquinais-je, en tapant sur son épaule décharnée.

Il se retourna et de ses yeux sans expressions il m'invita à m'asseoir près de lui. Cette soirée n'allait pas être une première pour nous, mais cela faisait longtemps que nous n'avions pas infiltré ou espionné quoique ce soit, la tension était donc à son comble, entre le Fou et moi. Cette atmosphère électrique se sentait.

« Pourvu que tout se passe bien... »

Dans le cas contraire, le statut de bannis d'Alerandir Dâah qui nous était attribué n'allait pas s'améliorer...

Nedrinella ne sentait ni le froid ni l'humidité ambiante, même la faible lumière ne génait pas ses yeux d'elfe. Elle traversait littérallement la forêt à la recherche du point de rendez vous qu'elle trouva sans difficulté. Déjà Thanator et AËraël étaient présents. Elle avança vers eux un grand grimoire à la main.

"comme promis voici, les notes de mon défunt époux sur la magie utilisée pour construire le navire des Cieux."

Elle parlait comme si personne ne pouvait lui faire du mal, d'ailleur c'était sûrement le cas.

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